Didier Berberat
Conseiller aux Etats

Pour le PS, les villes doivent jouir d’une influence accrue au sein du système politique. Lors du Sommet des villes, le 18 août à Bâle, il a revendiqué une véritable offensive en leur faveur dans les domaines des transports, du logement et des structures d’accueil extra-familiales. C’est que les villes sont confrontées à un certain nombre de problèmes qui ne peuvent plus être résolus à leur seul niveau confirme le conseiller national et membre de l’exécutif de La Chaux-de-Fonds Didier Berberat. Pour y parvenir, il faut réformer le fédéralisme suisse, hérité du 19e siècle.

Interview : Jean-Yves Gentil

Si, historiquement et lors de la création de la Confédération en 1848, il était normal de tenir compte des cantons et de leur accorder des concessions au niveau de leur représentation politique, aujourd’hui – notamment en fonction de l’exode rural vers les villes – celle-ci est n’est plus compatible avec les réalités actuelles. Ce que l’on constate, c’est que les villes sont confrontées en première ligne à diverses problématiques, qu’il s’agisse de l’intégration des personnes étrangères, du manque de structures d’accueil pour la petite enfance ou de logements abordables ainsi que de la congestion du trafic. Des domaines où la politique fédérale est lacunaire, précisément parce que les villes ne sont pas assez intégrées au processus décisionnel. Il s’agit donc de mieux reconnaître le rôle que jouent les centres urbains en accordant deux sièges au Conseil des Etats aux villes de 100'000 habitants et un à celles qui en comptent 50'000. Rien n’empêche par ailleurs des villes de moindre taille de s’associer à l’image du projet de réseau urbain neuchâtelois. L’objectif n’est cependant pas de diminuer la représentation des cantons. On ajoute, on ne retranche rien. En outre, nous proposons que les villes plus peuplées que le plus petit des cantons aient le droit de référendum. Ces propositions seront lancées au Parlement lors de la prochaine session sous forme d’initiative parlementaire.

Qu’est-ce qui manque aux villes pour faire entendre leur voix. Ne disposent-elles pas d’organismes à même d’influencer la politique fédérale en leur faveur, comme l’Union des villes suisses?

L’UVS n’est certainement pas inexistante, mais elle souffre incontestablement d’un déficit de visibilité, elle a du mal à se vendre. Par ailleurs, il s’agit d’un organe consultatif et non décisionnaire. Elle est loin d’avoir le poids de la Conférence des gouvernements cantonaux, par exemple, qui a su devenir un acteur incontournable du système politique helvétique.

Que veulent les villes ? Plus de moyens, plus de soutien ?

Les deux. En matière d’intégration des personnes étrangères, notamment, il faut absolument que le Confédération se décide à dégager des moyens supplémentaires. Nous exigeons également le dégel, l’année prochaine, des crédits fédéraux d’aide à la création de logement pour relancer une politique foncière active des pouvoirs publics. Pour rendre les villes plus attractives pour les familles, il faut aussi mettre à disposition suffisamment de places de garde pour les enfants. Il en manque des dizaines de milliers à l’heure actuelle et il faut au minimum doubler les fonds d’encouragement annuels en la matière. Ce que le PS appelle de ses vœux, c’est un véritable partenariat à trois entre villes, Confédération et cantons car ces derniers ne sont pas toujours enclins à rétrocéder aux centres urbains les montants qu’ils touchent dans le cadre de la péréquation financière.

Il y a un élément où on observe une différence de sensibilité entre romands et alémaniques, c’est celui de l’introduction de péages routiers dans les villes La solution que nous avons dégagée lors du Sommet de Bâle me convient. Elle revient à considérer le péage routier comme la mesure ultime pour résoudre les problèmes de trafic et à permettre aux villes qui le désirent de mener des essais dans ce domaine. Avant d’en arriver là, d’autres dispositifs comme le développement des transports publics et de parkings de dissuasion en lisière des villes me paraissent prioritaires. Ce qui est également indispensable, c’est que – si péage routier il y a – ses bénéfices soient intégralement alloués à l’amélioration de l’offre en matière de transports publics. Soit en abaissant les tarifs, soit en augmentant la desserte.

Un mot enfin sur le très commenté duel médiatique entre PS et UDC le 18 août à Bâle.

Tout ce que j’ai envie de dire, c’est de rappeler que nous sommes, nous socialistes, un parti qui réfléchit, qui se pose des questions sur le fond et cherche des solutions durables. Sur scène, nous avons réuni des politiciennes et politiciens responsables des plus grandes villes de Suisse, pas un bouc – et je ne parle pas, bien entendu, de Christoph Blocher, mais bien de Zottel, la mascotte de l’UDC. Même si nous avons pu paraître ennuyeux à certains journalistes, il n’en demeure pas moins que notre programme politique, lui, ne tient pas sur un timbre-poste et que, dans 20 ans, on parlera toujours des problèmes auxquels les villes sont confrontées, mais plus du tout du show folklorico-médiatique de l’UDC.