Didier Berberat
Conseiller aux Etats

Les responsables de l’information du seco sont vraiment des as ! En effet, les journalistes qui ont reçu le 10 juin dernier le communiqué de presse sybillin du Secrétariat d’Etat à l’Economie, lequel annonçait les décisions du même jour du Conseil fédéral en matière de chômage, pouvaient croire, de prime abord, à une décision positive en ce qui concerne les chômeurs.

Il était ainsi précisé qu’une augmentation de 120 du nombre maximum d’indemnités de chômage dans les cantons de Genève, de Vaud et dans les Montagnes neuchâteloises avait été octroyée pour les chômeurs et chômeuses de plus de 50 ans. Etrangement, et le seco ne le disait pas, c’est que par la même occasion les « sept sages » ont décidé de ramener à 400 les indemnités pour les chômeuses et chômeurs de moins de 50 ans habitant dans les cantons et régions susmentionnés. Cette décision, qui a pris effet le 1er juillet dernier, est un tour de vis important qui va dans la droite ligne de la politique très restrictive que mènent les autorités fédérales en matière de chômage. Brutale et franchement malheureuse, cette décision est tardive, car elle n’a laissé que trois semaines aux cantons et aux communes concernés pour se retourner, ce qui est un délai extrêmement court.

Il s’agit d’un net retour en arrière, car si ces chômeurs bénéficiaient jusqu’à présent de 520 indemnités, c’était parce qu’ils habitaient des régions et cantons dans lesquels sévit un fort taux de chômage. Au surplus, il s’agit également une fois de plus d’un transfert de charges de la Confédération sur les Cantons et les Communes, puisque les personnes rejetées par l’Assurance-chômage devront, pour certaines, s’adresser à l’aide sociale. A titre d’exemple, cette décision a touché en juillet 70 personnes qui ont dû s’inscrire à l’aide sociale pour la seule ville de La Chaux-de-Fonds.

Promesses trahies

Dans ses prises de position parues après cette décision, le seco a toujours dit qu’il respectait ainsi l’égalité de traitement entre les chômeurs des différentes régions de notre pays. Ce raisonnement n’est pas logique puisque « l’inégalité » n’a pas été supprimée mais restreinte aux seuls chômeuses et chômeurs de plus de 50 ans.

En prenant cette décision, le Conseil fédéral a trahi des promesses qu’il avait faites lors de la campagne qui a précédé la votation du 24 novembre 2002 relative au référendum contre la modification de la loi sur l’Assurance-chômage. En effet, afin d’amadouer la Gauche et certains cantons, notamment les romands, l’Exécutif fédéral avait prévu une soupape permettant de déroger à la durée réduite de 400 jours, en octroyant 120 indemnités de plus dans les régions où sévit un chômage prononcé. En Commission de l’Economie et des Redevances, dont je suis membre, et qui a traité de cette loi, le Conseil fédéral a toujours indiqué qu’il ferait preuve d’ouverture en la matière. La population neuchâteloise, qui a suivi la Gauche sur ce point, n’a pas été dupe et a refusé cette modification. Malheureusement, celle-ci a été acceptée par la majorité du peuple suisse.

Autogoal

Sur un autre plan, cette décision est un superbe autogoal, et je ne comprends pas que le Conseil fédéral n’ait pas remarqué qu’il prenait un risque très important dans le cadre de la votation du 25 septembre prochain sur l’extension de la libre circulation des personnes aux nouveaux Etats de l’Union européenne. Il s’agit, en effet, d’un signal très négatif qui pourrait pousser beaucoup d’électrices et d’électeurs à glisser un NON dans l’urne ce jour-là, puisque c’est, à l’évidence, une précarisation de plus du statut des chômeurs. On peut vraiment se demander s’il existe une coordination de la politique gouvernementale dans ce pays !

A l’évidence, la meilleure solution serait de rétablir les 520 indemnités dans tout le pays. Cependant, connaissant la majorité politique qui le dirige, cette proposition relève, pour l’instant, de l’utopie. Une autre solution, plus réaliste, consisterait à demander une durée des indemnités différente en fonction de l’âge qui partirait de 400 jours pour les plus jeunes pour arriver par palier à 520 jours pour les plus de 50 ans. Nous y réfléchissons en concertation avec le Canton, et une proposition dans ce sens pourrait être présentée lors de la prochaine session du Parlement fédéral. A suivre.