Didier Berberat
Conseiller aux Etats

Décidément, rien n’arrête la créativité de la majorité de droite du Parlement fédéral dans sa croisade antifiscale. En effet, même si les fêtes de fin d’année sont passées depuis longtemps, la droite parlementaire octroie, une fois de plus, de nouveaux cadeaux fiscaux aux personnes les plus fortunées de notre pays. Cette fois, sous prétexte de rendre la Suisse plus attractive fiscalement, la majorité des Chambres fédérales a décidé, le 23 mars dernier que les contribuables qui possèdent au moins 10% des actions d’une société anonyme ne seraient imposés que sur le 60% du total des revenus (dividendes) qu’ils tirent de ce capital. Ces nouvelles dispositions auront notamment pour effet d’inciter les dirigeants de grandes entreprises et actionnaires de celles-ci, à solliciter le versement d’une très grande partie de leur salaire sous forme de dividendes. En premier lieu, cette réforme II de l’imposition des entreprises est injuste, puisque les personnes salariées et celles qui perçoivent une rente ne seraient pas traitées de la même manière, car elles continueront à être taxées à 100%. Il n’y a aucune justification à ce que les revenus du capital soient privilégiés par rapport à ceux du travail.

Cette réforme est également anticonstitutionnelle, puisqu’elle viole les principes fondamentaux de l’imposition en fonction de la capacité économique et de l’égalité devant l’impôt. Ainsi, sur les 4 millions de contribuables que compte notre pays, seuls 40’000 (soit 1% de l’ensemble des contribuables) verront leurs impôts baisser grâce à cette réforme. Malgré un certain nombre d’avis de droit qui concluaient à l’inconstitutionnalité de cette mesure, la droite a poursuivi sa fuite en avant, totalement aveuglée par son credo antifiscal. On ne peut même pas justifier cette réforme en prétendant qu’elle est favorable au PME. En effet, les propriétaires des plus petites entreprises, très souvent des sociétés de personnes et non des SA, ne versent pas ou peu de dividendes. Dans la très grande majorité des cas, ils touchent un salaire soumis aux assurances sociales et réinvestissent le bénéfice dans le développement de leur propre entreprise. Par ailleurs, cette réforme est antisociale, car elle priverait annuellement l’AVS de 150 millions de francs, étant donné que les dividendes à l’inverse des salaires n’y sont pas soumis. De plus, chaque année, les pertes fiscales s’élèveraient à 1, voire 2 milliards de francs dans le pire des cas pour la Confédération, les cantons et les communes. Il faudrait donc augmenter d’autres impôts ou supprimer un certain nombre de prestations publiques fédérales, cantonales ou communales, par exemple dans la formation, la politique familiale ou sociale ou les transports publics. Enfin, au lieu de réguler la concurrence fiscale entre les cantons, comme le souhaite aussi la Conférence des directeurs cantonaux des finances, la réforme exacerbe au contraire la sous-enchère fiscale.

Après avoir lutté contre ce projet indécent en commission, puis au Parlement, nous avons décidé de lancer un référendum dont le délai court jusqu’au 12 juillet 2007 (liste à télécharger sous www.imposition-entreprises.ch). D’autres organisations de gauche ou syndicales nous appuient et j’appelle tous les membres du PSN à se mobiliser contre ces nouveaux cadeaux fiscaux en récoltant des signatures jusqu’aux vacances d’été, même si je sais pertinemment qu’il y a des façons plus agréables d’occuper ses samedis. En faisant de tels cadeaux fiscaux, la droite, sans s’en rendre compte, a offert sur un plateau, à la gauche, un magnifique cheval de bataille en vue de la campagne des élections fédérales de cet automne.

Mobilisons- nous !

Didier Berberat, Conseiller national